OCTOBRE ROSE
Témoignage de notre marraine Anaïs
🌷Peux-tu nous expliquer quand et comment tu as appris que tu avais un cancer du sein ?🌷
C’est en novembre 2020, à 31 ans, que j’ai appris que j’avais un cancer, en plein COVID et après 2 mois où je n’avais pas été prise au sérieux.
Un peu plus tôt, en septembre, j’ai senti une masse de 2cm environ dans mon sein droit, arrivée du jour au lendemain. J’ai quand même trouvé ça très bizarre (mauvais pressentiment) me disant que c’était peut-être hormonal. J’ai attendu la fin de mon cycle mais cette masse était toujours là. J’ai demandé un rendez-vous en urgence à ma gynécologue et là, j’ai commencé le parcours du fameux « Vous êtes trop jeune, c’est rien ». Ignorance totale de ma gynéco, après deux mails restés sans réponses, au bout d’un mois elle daigne me répondre d’aller voir mon médecin traitant pour ça. ✅ 1 mois de perdu. Mon médecin traitant me fait tout de suite une ordonnance pour une échographie, mais je n’étais pas dans un parcours de prévention donc je n’ai pas eu de rendez-vous avant octobre. ✅ Je perds encore 1 mois. Puis écho, mammo et biopsie mais même au centre d’imagerie, on me dit « A votre âge, c’est rien ne vous inquiétez pas ». Puis le 10 novembre je viens chercher mes résultats et on me demande de patienter dans une pièce, pour me balancer en toute brutalité « Finalement ce n’est pas bénin, vous avez un cancer HER2 POSITIF de stade 3 avec une agressivité à 65% ». Pas plus de 2 minutes après cette phrase, on m’a demandé de choisir un hôpital, un oncologue et un chirurgien, et c’est ici que la tempête a commencé.
🌷Quel a été ton sentiment à l’annonce de ta maladie ?🌷
Un ouragan, une claque en pleine gueule ou une grosse blague, j’hésite encore. Un bouleversement, les larmes puis toutes ces questions… pourquoi moi, comment je vais faire, comment y arriver, comment le dire à mes proches, comment ça va se passer, encore pourquoi, et est-ce qu’il y aura un après ?
Ironiquement ce soir-là… après un SOS envoyé à mes amies qui m’ont retrouvée à mon domicile dans l’heure, j’ai bu un verre à ce nouveau combat qui allait devoir commencer.
De nature positive, j’ai voulu aborder cette étape de ma vie comme un combat qu’il était impossible de perdre. J’allais devoir gagner, c’était une évidence. Et c’était avec le sourire que j’allais affronter tout ça, avec l’aide de mes proches, mais avant tout, avec mon mental.
Mais malgré ça, il faut savoir qu’affronter son propre combat et mettre une pause sur sa vie, ses projets, pour une durée indéterminée, c’est vraiment quelque chose de très difficile à accepter.
🌷Comment s’est passé le traitement ?🌷
En réalité ce n’est pas un traitement mais plusieurs… face à l’agressivité de mon cancer, c’était la chimiothérapie la priorité pour ralentir la progression. J’ai donc eu des chimios de novembre 2020 à avril 2021, puis j’ai été opéré d’une tumorectomie (retrait de la tumeur) en mai 2021. J’ai ensuite eu de la radiothérapie tous les jours de juillet à septembre 2021, et ensuite j’ai continué des chimiothérapies plus douces jusqu’en février 2022.
Les traitements sont difficiles, après les premières chimiothérapies je passais une semaine dans mon lit, avec de terribles nausées. C’était épuisant… puis il y a les dommages physiques, les cheveux, les cils, les ongles, se voir dans le miroir devient très difficile, alors on finit par l’éviter, pour ne plus pleurer. Le goût est modifié avec les traitements, tout a un goût de fer, c’est aussi très désagréable. Je dois dire qu’on péri un peu pendant un temps… tout semble difficile, j’ai perdu presque 10 kilos. Puis la vie reprend son cours entre deux traitements, ça devient une routine finalement. Heureusement je n’étais pas seule, et c’est aussi à ça qu’on s’accroche, à ses proches, aux relations humaines, à tout ce qui peut nous donner de la force.
🌷Est-ce-que tu as été accompagnée ?🌷
Le plus affreux dans cette maladie, c’est toutes ces questions qu’on se pose et qui restent sans réponse. Les médecins ont les réponses techniques mais rien sur tout ce qui concerne le confort, ce qui va arriver, comment je vais me sentir, comment je peux faire pour que ce soir plus facile… C’est en poussant les portes de La Boutik de Marie que j’ai enfin pu respirer un bon coup. Marie nous explique tout du début à la fin, elle nous accompagne au fil des traitements, c’est son métier et elle a vécu deux cancers, elle sait de quoi elle parle. Elle est disponible quasi H24, ce n’est pas un business.
Au-delà de ça bien sûr, j’avais mes amies, les amis qu’on se fait en cours de route, le travail, ma famille. Il y a eu des hauts, mais aussi beaucoup de bas, beaucoup de moments où malgré tout, on se sent quand même bien seule dans ce combat. Et aussi on s’en veut, de faire subir ça aux gens qu’on aime.
🌷Quels conseils donnerais-tu aux jeunes femmes ?🌷
De ne pas croire qu’elles sont protégées par leur jeune âge. Durant mon combat, j’ai croisé beaucoup de femmes et beaucoup d’entre elles avaient moins de 40 ans, parfois moins de 20 ans. Le conseil que j’ai envie de leur donner c’est « Attention ça n’arrive pas qu’aux autres ». Il ne faut pas non plus se faire du souci mais il faut être vigilante sur les signes d’alerte (ganglion, sein déformé, écoulement du téton…) et consulter son médecin rapidement si cela est nécessaire. Surtout, écoutez-vous ! Si vous sentez que quelque chose ne vas pas c’est probablement qu’il y a un problème.
Et s’il vous plaît, sentez-vous tous concernés, cela peut toucher beaucoup de monde autour de vous : une compagne, une mère, une amie, une sœur, une fille…
🌷Quelle place a occupé le sport pendant cette période ?🌷
Une place immense ! Je n’ai pas arrêté le travail, ni le CrossFit. Mais attention, c’est très personnel, chaque personne réagit différemment face à une telle épreuve. Moi j’avais besoin de ça pour me dépasser, pour me sentir vivante et aussi pour le lien social (tombée malade en plein COVID, ça n’a pas été évident car j’étais très enfermée, personne ne pouvait m’accompagner à l’hôpital).
Fred a été très compréhensif et avec Marie, ils m’ont accompagnée avec tellement de bienveillance (Seb n’était pas coach encore). J’étais vite essoufflée car les traitements fatiguent beaucoup et ont des effets sur le cœur sur le long terme, mais on a su adapter ou s’arrêter par moment ! 😅
Je me souviens du jour où j’ai enfin enlevé mon bonnet, je crevais de chaud on s’entraînait dehors à midi en plein soleil, j’avais qu’une envie c’était de l’enlever. Fred est venu me dire de l’enlever avec insistance, que si j’avais chaud, jamais personne ne me jugerait ici. Je lui ai répondu « Jamais de la vie tu me verras comme ça ! ». Mdr… le lendemain je venais le crâne à l’air ! 😂 Et je me suis sentie bien et surtout j’avais moins chaud 😂. Malgré les regards, les adhérents eux aussi ont tous été bienveillants. A aucun moment je me suis sentie exclue à cause de ma maladie, bien au contraire.
Venir à la Box, c’était vraiment le meilleur moment de ma journée, je repartais le cœur rempli de belles ondes ☀️ et un peu plus forte pour affronter la suite.
🌷Et maintenant, comment vas-tu ?🌷
Aujourd’hui en rémission, je trace mon chemin. Je suis suivie pendant 5 ans, les risques de récidives interviennent en principe dans les 3 ans concernant mon cancer. C’est une angoisse à chaque contrôle, c’est éprouvant. Mais je me sens bien ! Plus forte que jamais, cette maladie a changé totalement ma façon de voir les choses, ma façon d’aborder la vie ou même les gens ! Je croque la vie à pleine dent aussi parce que quand on passe par là, on réalise beaucoup de choses que d’autres ne voient pas. Il y a des cicatrices que l’on voit, puis celles qui laissent une trace mais qu’on ne voit pas, à l’intérieur… Et s’il y a une chose que cette maladie m’aura apportée, c’est bien de prendre conscience qu’on a qu’une vie, qu’il ne faut pas s’attarder sur les choses superflues, profiter des gens qu’on aime, faire ce qu’il nous plaît à nous et que l’avis des autres compte peu au final. C’est peut-être déjà naturel pour certaines personnes mais moi, il m’aura fallu ce combat pour le réaliser : profiter aujourd’hui car demain tout peut s’arrêter.